Episode 3

Radissi lut la lettre et acceptait de m’accompagner pour la lui remettre. Je m’efforçais de dormir pour que coure cette nuit, pour la raccourcir.
Le matin, j’étais pressé d’aller au lycée, pas pour écouter les explications des tournures Mathématiques mais pour voir Simone. Je partis sans traîner. Mine un peu sérieuse, je saluai mes camarades et allai m’asseoir à ma place. Je confondais les formules d’une suite géométrique à celles d’une suite arithmétique pendant le cours. A dix heures, heure de la pause,  je partis vite voir mon ami. Nous nous dirigeâmes vers la classe de cinquième. Il fallait que nous remissions cette note, aveu loin d’un diatribe. Nous nous renseignâmes.

-Elle est partie vers la classe de seconde B, nous dit une de ses camarades.
Ohhhh la voici qui venait. Je tremblais… Quels sont les mots que je devais utiliser ? Je n’avais pas le temps de jouer avec les mots, ou essayer de seconder Molière ou Senghor. Nous la saluâmes et je parlai, car le canari ayant été brisé sur la tête, l’eau mouillait le corps.
-Je suis venu te remettre la note… J’ai écrit comme tu le demandais…
-Mais je… je… ne peux pas la prendre ici. Tout le monde nous regarde. Je pense que c’est mieux à onze heures. Je sors à onze heures. Et toi ?
-Je sors à douze heures.
-Donc je vais t’attendre à midi devant votre classe.
Encore une surprise ! M’attendre devant ma classe ? Nous repartîmes. Je retournai en classe pour le cours de philosophie avec M. Soro. J’étais en classe mais mon esprit n’y était pas. Le professeur nous parlait de la liberté mais je pensais à l’amour, à un cours antérieur où il nous a parlés de l’amour selon Platon. Ce cours me revenait en esprit. Platon dans « Le banquet » a expliqué l’origine de l’amour. Il fallait que je lusse cette oeuve. L’heure avançait lentement…
A onze j’apercevais ce groupe de trois filles se dirigeant vers la salle et vint s’immobiliser sous l’arbre qui était devant la porte. Sûrement, ce groupe voulait me voir pour retirer cette précieuse note. Il attendit jusqu’à douze heures. Le professeur partit. Je feignais ne pas les voir et donnait l’impression de recopier quelque chose, adossé à ma table car j’avais honte à cause non seulement de mes camarades mais aussi des camarades de Simone. Un camarade sortit les saluer et revint me dire ceci :
-Ousmane, les filles arrêtées devant la classe veulent te voir, elles disent qu’elles ont quelque chose à retirer avec toi.
-Ah OK. Je vais sortir les voir, ai-je répondis innocemment.
Je sortis, les saluai, remis la note et rebrousser vite chemin après leur avoir dit merci.
Je venais de franchir un pas. Comment Simone comprendrait-elle que je ne suis pas mu par un esprit de sexualité ? Comment pourrait-elle savoir que l’amour et la sexualité sont deux choses dont je connais le lien et la grande différence ? D’ailleurs comment pouvait-elle se surpasser de son idée de protestantisme sectaire et accepter mon islam modéré ? Soudain, je voyais Samira passer. Samira est cette fille que j’ai draguée dès octobre et qui semblait me donner une chance. A cause de ma connaissance dans toutes les matières et notamment en Mathématiques, j’avais réussi à la séduire. Je n’avais plus son temps. Je ne voyais plus que Simone. « Oh Simone ! Je souffre de mon affection. Comment peux-tu comprendre ? A peine je t’ai rencontrée que je crois maintenant à l’amour. Je suis sûr que je t’aime. Je suis même prêt à t’épouser. Alphonse de Lamartine a raison quand il dit qu’un seul être vous manque et tout est dépeuplé».
Je racontai la scène à mon ami. Il m’encourageait ou faisait semblant de le faire… Cette nuit je devais voir Simone pour la réponse. Comme d’habitude je partis au lycée. Simone n’était pas à sa place ou peut-être elle s’était levée pour un bout de temps. Je demandai et on me dit qu’elle était venue. Enfin la voici qui arrivait. Nous nous aperçumes dans la lumière. Nous nous saluâmes brièvement.